Madame la Ministre,

Le nouveau budget initié par votre gouvernement avait prévu l’annulation des 4000 suppressions de postes, cette annulation a pu produire dans l’opinion publique et auprès des enseignantes et enseignants l’espoir de ne pas avoir à subir des fermetures de classes massives. Malheureusement, la réalité a été toute autre puisque ça s’est quand même traduit dans le premier degré par 470 suppressions de postes. A ce jour, alors que la carte scolaire est terminée dans les départements, nous faisons le constat d’un nombre important de fermetures de classes puisque c’est près de 5000 fermetures contre seulement 2300 ouvertures qui sont actées. Dans le même temps, le nombre de postes « hors la classe » au service de la politique ministérielle augmente. Ce premier bilan n’est pas supportable et de Tourcoing à Toulouse en passant par Pointe à Pitre, les mobilisations contre cette carte scolaire s’enchaînent partout en France avec les personnels, les élu•es et les parents d’élèves. Force est de constater que la baisse des effectifs par classe ne sera pas radicale comme on aurait pu l’imaginer. Nous resterons donc les mauvais élèves de l’union européenne loin derrière la Grèce, la Lettonie ou encore la Pologne qui ont 17 élèves par classe en moyenne.

Ces décisions illustrent la déconnexion avec le terrain qui vit la vraie vie dans les classes et dont la contestation illustre une nouvelle fois le manque de confiance envers le ministère.
Autre déconnexion totale entre votre ministère et le terrain, le satisfecit lors du comité de suivi sur l’école inclusive qui montre un fossé abyssal entre annonces et réalités. Vingt ans après la loi de 2005, la FSU-SNUipp réaffirme la nécessité d’une inclusion réussie pour tous les élèves mais le compte n’y est pas : personnels comme élèves souffrent d’une maltraitance institutionnelle. A ce titre, elle a décidé d’engager une consultation massive de la profession pour qu’elle s’exprime et que sa voix soit enfin entendue.
Madame la Ministre, visiblement, vous avez décidé de ne pas entendre les personnels, ni même les organisations syndicales, puisque vous poursuivez le chantier de la direction d’école sans aucune concertation. Nous avons en effet appris au détour d’un dépôt d’alerte sociale que le référentiel direction d’école de 2014 allait être réécrit. Organiser un tel chantier sans consulter et sans dialogue, alors même que la FSU-SNUipp demande depuis 2022 d’échanger sur ce sujet afin d’améliorer les conditions de travail des directeurs et directrices d’école est une véritable marque de mépris à l’égard de la profession. Modifier le référentiel des directeurs et directrices d’école en les plaçant dans la chaîne hiérarchique notamment en leur donnant les moyens, je cite « d’exercer une influence sur les pratiques et gestes professionnels » c’est vraiment méconnaître les besoins de nos directeurs et directrices ainsi que le fonctionnement de nos écoles. Ils et elles l’ont dit à travers plusieurs enquêtes syndicales mais également du ministère, les directeurs et directrices ont besoin de temps mais aussi d’une aide administrative pour réaliser leurs missions. Ils et elles ne demandent pas à valider les pratiques de leurs collègues adjointes et adjoints.

Enfin, Madame la Ministre, nous allons étudier aujourd’hui les textes des programmes de cycle 3. La réécriture des programmes de l’école au lycée se fait à marche forcée. Les programmes de cycle 1 et cycle 2 n’ont fait l’objet d’aucune concertation aboutie.
Lors de la séance du CSE du 6 juin 2024, la communauté éducative a rejeté l’arrêté portant sur ces programmes avec 47 voix contre et 3 voix pour. Les amendements de nos organisations ont recueilli des votes favorables mais ils n’ont pas été pris en compte par l’administration. Depuis, aucun véritable dialogue social ne s’est engagé sur les programmes et actuellement les formateurs et formatrices sont mis en difficulté dans les départements pour les mettre en œuvre.

Nous rappelons que les enseignantes et enseignants n’ont pas besoin de nouveaux programmes, ni d’injonctions sur leur pratique pour faire leur métier. Concernant les programmes de cycle 3, aucune organisation syndicale n’a été auditionnée ou consultée avant la publication des projets et depuis le calendrier s’est accéléré.

Modifier les programmes nécessite des temps de concertation mais également du dialogue, du temps d’appropriation par les équipes et de la formation si l’on souhaite qu’ils soient ensuite appliqués dans les classes. Vouloir mettre en œuvre l’application des programmes à la rentrée est inconséquent et méprisant pour la profession. Le temps éducatif n’est pas celui du politique et la succession de nouveaux programmes a pour conséquence de déstabiliser le système sans améliorer les conditions d’apprentissage des élèves, ni les conditions de travail des personnels, bien au contraire.

Madame la Ministre, vous avez rappelé à plusieurs reprises votre attachement au dialogue social. Pour mener des réflexions et des concertations de qualité sur un sujet aussi important que celui des programmes, il faut du temps. Nous continuons de vous demander de reporter la mise en application des programmes.

Conseil Supérieur de l'Education du 27 mars 2025

Conseil Supérieur de l'Education du 27 mars 2025